Le chômage croissant des jeunes en Italie et en Europe a ramené au centre du débat le thème de  l’éducation en tant que facteur de développement d’un capital humain et en tant que réaction à la crise. Et la littérature scientifique et les principaux décideurs publics italiens sont en train de s’orienter progressivement vers l’analyse et la mise en système de théories, de pratiques et de modèles qui permettent aux étudiants de connaître le travail et les entreprises dès leur parcours scolaire : en effet, les données démontrent que presque la moitié du chômage des jeunes  italiens dépend de l’articulation manquée entre l’école et le travail.

     En particulier,  on voit combien est délicat le passage du diplôme au premier emploi, la « transition école-travail », qui dans notre pays peut durer de 8 à 12 mois et qui, souvent, est peu cohérente, car bien  souvent  le travail que l’on trouve ne correspond pas au parcours de formation du jeune. Pour une transition rapide et cohérente l’Europe propose quelques instruments : l’alternance école-travail, l’orientation scolaire à l’entrée et à la sortie, l’apprentissage et la culture d’entreprise. Quand ces 4 instruments se combinent dans un territoire donné, les transitions s’améliorent : par conséquent, les taux  d’emploi des jeunes augmentent et entre-temps on garantit aux entreprises un capital humain qui répond aux demandes de la production.

     Dans les 10 provinces italiennes premières pour l’emploi des jeunes (données ISTAT) les 4 facteurs ci-dessus sont tous présents et reliés l’un à l’autre. Mais le décalage avec les provinces où ces instruments ne se concentrent pas et restent des expériences isolées, est très marqué : c’est le cas de la plupart des territoires du sud de l’Italie.

     Le fort chômage des jeunes et la difficile transition école-travail sont des problèmes structuraux  non pas causés, mais aggravés par la crise. Comment les résoudre ? En redécouvrant les aspects particuliers de l’éducation « made in Italy » par un voyage qui part de la tradition de formation de notre pays jusqu’aux perspectives de l’Industry 4.0 (ndlr: nouvelle façon d’organiser les moyens de production) : en conjuguant la tradition et l’innovation les jeunes italiens et italiennes peuvent découvrir des opportunités qu’ils n’imaginaient pas. Une dimension humaine du travail 2.0 (ndlr: adaptation du travail au numérique) est possible.

 

LE PASSÉ: LES MAINS  ET L’INTELLIGENCE EN ITALIE, UNE GRANDE HISTOIRE OUBLIÉE

     En Italie la formation et le travail ont toujours été joints jusqu’aux années soixante du XX ᵉ siècle. Dans  la tradition de l’économie civile, à Carrare naît en 1898 l’Institut de l’apprentissage dans la période où naissent les premières universités (Bologne 1088). Pendant la Renaissance, des  apprentis comme Michel-Ange et Raphaël ont complètement changé les modèles en « humanisant » les arts et en diffusant le principe du « beau et bien fait ». Au XIXᵉ siècle Don Bosco fait de la formation professionnelle un instrument de rattrapage des gamins des rues et de rachat social. Pendant le boom économique de l’après-guerre le travail manuel et l’esprit d’entrepreneur ont rendu ” grand” notre pays en posant les bases de ce qu’on connaît dans le monde entier comme “made in Italy”.

 

LE PRÉSENT: LA REFORME DE L’ÉCOLE ET LE RÔLE FORMATEUR DES ENTREPRISES

En Italie, la réforme de l’école qui est actuellement en discussion donne beaucoup de place au rapport entre l’école et le travail. Le texte reconnaît l’importance des modèles de formation que l’Europe a reconnus comme les plus efficaces dans la lutte contre le chômage des jeunes, en particulier le modèle de l’alternance école-travail qui se présente comme une méthodologie didactique obligatoire dans les écoles secondaires du deuxième cycle. Cette disposition prend sa source dans les  modèles de collaboration école-entreprise déjà expérimentés localement (Federmeccanica, Enel, Confindustria) pouvant devenir «  un système ». Le rapport entre le monde de la production et le monde de la formation, le partenariat de la formation entre les enseignants et les entrepreneurs, les  réseaux entre l’école et les entreprises, en sont  les instruments.

 

LE FUTUR : L’INDUSTRY 4.0 ET LES NOUVELLES PROFESSIONS. LA FORMATION APPLIQUEE DÉJÀ AUJOURD’HUI

     Dans la société actuelle de la connaissance, les compétences sont le critère majeur du choix d’un ouvrier dans l’industrie. Dans cette entreprise un ouvrier robuste et résistant vaut beaucoup moins qu’un mince ingénieur informaticien expert en big-data. Le rapport, donc, entre entreprise et formation change selon une conception d’entreprise formatrice qui a été identifiée comme fondamentale sur plusieurs fronts et depuis plusieurs décennies.

     Une bonne école et de bonnes notes ne font pas d’un jeune un expert dans la gestion de machines complexes connectées entre elles grâce à ce qu’on peut appeler « Internet of Things ». Il est nécessaire de se former sur les lieux, de faire l’expérience directe de leur fonctionnement. Une expérience qui est en même temps une possibilité d’innovation, un terrain privilégié pour la recherche dans le domaine de la technologie industrielle. Si la formation et le travail ne se concilient pas, et c’est là d’abord un effort culturel, le démarrage de ce qu’on connaît désormais comme « Industry 4.0 » est contrarié dès le départ.

     La formation est ce qui caractérise le parcours de tout travailleur, d’abord à travers les premières années scolaires, puis à travers des expériences vécues pendant la période scolaire et ensuite  directement pendant le travail, grâce à la formation continuelle que les entreprises technologiques ont l’exigence d’offrir. Les nouvelles professions pour les jeunes vont s’insérer dans le sillon des secteurs entraînants de l’industrie italienne : chimique, ITC, pharmaceutique, métallurgique, métallurgique et mécanique, gomme, green imprimerie digitale, domotique, robotique. Avec ces secteurs avancés, il y en a d’autres traditionnels qui, grâce aux technologies, vont revenir à la mode. C’est à l’école de former les compétences nécessaires à gérer le changement de la production, et  non pas à le subir.

Intervention lors de la 60ème rencontre annuelle du Siesc: Otium et negotium: Eduquer les jeunes à la dimension humaine du travail