Genèse de la réflexion.

C’est à l’initiative du MIEC et de la JECI que cette réflexion commune a commencé. En effet, au début de l’année 2001, le MIEC et  la  JECI mettent en lumière, dans un contexte de crise, l’importance de réfléchir ensemble à l’avenir des mouvements. Beaucoup de mouvements connaissent, en effet, des difficultés : recrutement plus difficile, budgets en baisse, relations plus distanciées avec l’Eglise hiérarchique.

Les mouvements internationaux ont été très importants  dans le passé. Ils ont eu une influence certaine au sein de l’Eglise et de la société. Dans l’Eglise, les mouvements internationaux sont maintenant une réalité parmi d’autres. Et dans la société, ont-ils le même impact et la même efficacité qu’il y a quelques années ? La question se pose.

Lors de la rencontre du Groupe des Huit, c’est-à-dire des Mouvements internationaux d’Action Catholique Spécialisée (MIACS), en janvier 2002, après une réflexion interne, le MIEC et la JECI proposent aux autres MIACS, dont la CIJOC, une réflexion commune afin d’analyser la situation actuelle de l’Action Catholique Spécialisée, le contexte dans lequel évolue chacun des MIACS, puis de partager les visions des uns et des autres sur l’avenir.

Le 23 mars 2002, à Paris, chacun des mouvements internationaux dresse un état des lieux de sa situation. Le Groupe des Huit fait ressortir les convictions fortes qui l’animent, les questions qu’il se pose sur la pertinence des mouvements, sur leur action et leur impact structurant dans la société et dans l’Eglise. Il dégage une problématique de réflexion et fixe une rencontre pour juillet 2002. L’objectif en sera, après tout ce travail de discernement, de tracer des perspectives et de dégager des pistes pour avancer.

Le contexte, nos défis et nos convictions.

Dans cette perspective de mise à plat, à partir des travaux préparatoires de chacun des mouvements internationaux, les MIACS ont identité, notamment lors de la réunion du 23 mars 2002, un certain nombre de défis à relever et de convictions à affirmer pour tenir pleinement leur place dans une société et dans une Eglise toutes deux globalement en crise.

En 2002, quels défis …

pour la société

– puissance de la globalisation/mondialisation libérale qui laisse bien des pays et des groupes sociaux sur le bord du chemin (prépondérance du profit économique au détriment de l’environnement),

– société de consommation dans laquelle le matérialisme empêche de vivre solidarité et spiritualité,

– émergence de l’individualisme, affirmation de la valeur de la personne en tant que telle,

– impact des nouvelles technologies de l’information,

–  remise en cause de la militance,

– absence de réponse adéquate aux questions posées dans la vie quotidienne (éducation, environnement, violence, consommation…),

– prégnance de l’immédiat, avec des difficultés à regarder vers l’avenir, à anticiper.

dans l’Église

– réaffirmation de la structure paroissiale où les mouvements ont moins de place,

– importance du spirituel,

– moindre prise en compte de la foi exprimée à partir de la vie. Or, le lien « Vie-Foi » est fondamental pour tous nos mouvements,

– difficultés à rendre compte de comment nous sommes acteurs d’évangélisation dans le monde et dans l’Église.

défis internes

– défi de nos identités : avons-nous un public cible spécifique ou devons-nous être largement ouverts ?

– défis autour de nos valeurs : comment promouvoir la dignité de toute personne, la reconnaissance de tout homme, de toute femme, de tout groupe humain comme acteurs de leur propre développement ?

– Dans quelle mesure et de quelle façon nos mouvements sont-ils des espaces de socialisation ?

– baisse de la militance : elle ne nous est pas spécifique, mais nous atteint,

– pour les mouvements d’adultes : vieillissement des militants,

– démotivation devant l’ampleur de la tâche à accomplir,

– quel leadership : qui est en conduite du mouvement ? Quel accompagnement spirituel ?

– difficultés à transmettre notre méthodologie,

– difficultés à rendre visibles nos réflexions et nos actions à l’extérieur, dans la société et l’Église,

– Problème du financement.

et quelles convictions ?

– Situés au coeur d’une société civile en constante évolution (situation internationale après le 11 septembre, dévalorisation du rapport à la politique et montée des nationalismes, évolution des modes de production et d’emplois, etc.) et au cœur de l’Eglise…

Situés au carrefour des mouvements de spiritualité et d’action, nous qui devons sans cesse articuler « être » et « faire » (quelles solidarités, quelle ouverture au monde ? ),

– Conscients de la difficulté à faire passer nos convictions dans l’Eglise et dans la société, mais certains que nos intuitions sont encore pertinentes pour l’Eglise et pour la société, nous voulons :

– Créer des espaces de réflexion où peut naître la créativité, où même la dénonciation de ce qui va mal est possible, dans le respect de chacun.

– Etre à l’écoute et témoins de la vie, des caractéristiques fortes de ce que vivent les personnes dans la société dans son ensemble.

– Etre des forces de renouvellement AVEC les personnes, en particulier les plus démunies. Cela sous-tend un effort constant d’inculturation.

– Proposer le modèle d’un monde plus juste (démocratie, solidarité) où la vie, même ordinaire, est prise au sérieux.

Mais, pour cela, nous sommes, par ailleurs, tenus à exercer notre vigilance et notre esprit critique et à garder à l’esprit ces questions :

– comment articuler intuitions d’origine, nouveaux langages, nouvelles manières d’être ?

– comment gérer la tension entre la gratuité de nos propositions et l’efficacité de nos actions pour la société ?

– Comment ne pas limiter la révision de vie à une méthode mais la vivre comme une spiritualité, comme un outil qui donne sens aux comportements et aux actes posés ?