La nouvelle Evangélisation se confronte à la culture moderne et sa nouvelle vision de l’Homme et du Monde. Elle implique pour l’Eglise de relire autrement son discours universel qui s’imposerait à tous, extérieur aux différentes cultures auxquelles il s’adresse. Elle devrait reconnaitre que ce discours s’inscrit dans une histoire, c’est une proposition spécifique de l’héritage judéo chrétien, des Grecs et des Lumières dans l’Europe occidentale.

Résumé du texte (Le texte intégral est en pièce jointe)

Le défi de la nouvelle évangélisation vient du constat d’échec dans la communication de l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui qui vit comme si Dieu n’existait pas. Après la sécularisation, c’est maintenant une autre perception de l’homme et du monde qui se développe, induite par les transformations sociales et culturelles, et entraînant des conséquences sur la façon de croire en Dieu. L’Eglise y voit une perte dans l’unité de la culture, la désagrégation des références fondamentales jusque là admises, et un relativisme qui devient la seule forme de pensée commune.

Ce qui caractérisait cette ancienne culture, c’est la conviction occidentale de posséder une représentation du monde, de l’homme, et de l’histoire valable pour tous. Chrétienne, laïque ou communiste, elle a toujours justifié la valeur universelle de sa vérité par l’accès à un fondement absolu : Dieu, la raison, la nature, la science.

Mais cette conviction est ébranlée d’une part par la montée en puissance d’autres pôles de civilisation, et d’autre part par la découverte des contradictions du « modèle » occidental: les conflits internes en Europe et les limites écologiques de ce mode de développement, ainsi l’habitude de l’analyse des conditions sociales, psychologiques de l’exercice de la raison. La croyance dans l’universalité de notre vision du monde, est remise en cause par la conscience de la diversité fondamentale des représentations de l’homme : « L’homme n’existe que dans la pluralité des cultures, des langues, des religions »

Cette dénonciation s’étend à tous les grands récits et tous les dogmatismes, mais ce ne sont pas la laïcité, la science, la raison, qui sont rejetées, mais leur érection en compréhension exclusive de l’homme.

La bataille des « fondements », perd de son importance puisqu’ils ne servent plus à conférer un caractère absolu à un message. Il devient alors possible d’imaginer la vie de l’humanité sans se référer à la transcendance. On s’engage moins dans des grands mouvements porteurs d’une « vision du monde», que dans des associations à l’objectif plus limité. Même l’Humanisme, fondateur des grands universalismes, n’est plus accepté tel quel par d’autres civilisations et, chez nous, n’est plus très mobilisateur parmi les nouvelles générations.

L’Instrumentum laboris se situe hors de cette perspective qu’il considère comme un obstacle à la transmission de la Foi. Le discours de l’Eglise se situe hors culture, jamais les rédacteurs ne s’interrogent sur la particularité de leur propre langue, sur l’éventuelle « ancienneté » du discours de l’Eglise. L’Évangile est toujours évoqué comme un discours universel. C’est de l’extérieur que l’Eglise se positionne comme juge de cette nouvelle culture, au nom de vérités universelles et absolues marquées par aucune origine historique.

La nécessité et le bienfait du dialogue avec tous est largement rappelée. Mais la difficulté à laquelle doit répondre la nouvelle évangélisation est dans la manière de parler de son message. Il ne s’agit plus seulement d’une discussion dans la même langue, mais de la représentation que se fait de lui-même celui qui parle. Il faut d’abord avoir pris la mesure de la distance. Vu du coté de cette nouvelle culture, l’enjeu de l’incompréhension est le statut absolu, qui se croit « hors culture particulière».

Comment resituer le christianisme et l’humanisme laic dans un contexte de pluralité ? Des questions continuent à se poser, qui prennent tout leur poids à partir du pluralisme culturel assumé : le vivre ensemble des peuples, les principes communs quand aucune autorité absolue ne peut les imposer. Le christianisme et l’humanisme laïc ne seront audibles, qu’à travers une relecture de leur inscription dans une histoire : non plus une vérité universelle sur le monde, qui permettrait de juger les autres, mais une proposition spécifique de l’héritage judéo-chrétien, des Grecs et des Lumières dans l’Europe occidentale.